lundi 7 octobre 2013

Le camarade sexiste

Extraits du post d’une bloggueuse italienne : Laura Capuzzo

Je voudrais vous servir un descriptif du type de gars que je ne supporte vraiment pas. Ça fait un bail que je pense à ce type qui m’embête pas mal. Je l’ai rencontré assez souvent et il faut lui rendre le fait qu’il a la qualité de ne pas me sembler moins désagréable malgré le poids de mes années. Tant mieux, parce que je serais bien triste de devenir plus tolérante juste parce que je vieillis.

Le camarade sexiste est un personnage bien plus commun que ce qu’on pourrait penser. C’est un homme de gauche, très engagé ; il se dit fièrement communiste, surtout si il a plus de 40 ans, ou alors s’affirme comme « anarchiste depuis toujours ».

(…)

Le camarade sexiste est très attentif à son langage. Il sent les réacs et les racistes à un kilomètre et condamne sans appel les militants droitiers, qu’ils soient actifs ou passifs, surtout dans ses expressions. Il sait peser ses paroles et fait très attention à ce qu’il faut dire selon les situations, parce qu’il connait la force du langage et il sait à quel point cela peut frapper et servir la cause d’utiliser les bonnes paroles aux bons moments.  

Mais, il y a un mais.
Oui, oui, camarade sexiste, il y a un ‘mais’.


                                
Mais ça t’ennuie vraiment beaucoup lorsque les camarades femmes gèrent une initiative, une occupation, ou soulèvent des problèmes auxquels tu n’avais même pas songé, et en plus propose des solutions qui t’obligent à reconsidérer un peu ton rôle. Mais ça te rend malade d’être exclu de certaines discussions, ou que de n’y être admis qu’avec les réserves nécessaires parce qu’en tant qu’homme, tu n’as pas la priorité sur certains sujets. Tu te demandes qu’est-ce que c’est que cette manie de s’intéresser au patriarcat, au machisme, à la violence de genre. Ce ne sont pas les vrais problèmes ; ce sont des petites discussions qui nous font perdre de vue notre objectif, notre idée, les choses importantes.

Toi, camarade sexiste, tu as développé un rejet naturel des expressions comme « sale arabe » ou « flamand de merde », mais tu n’hésites pas à utiliser l’expression « connasse » pour désigner une femme au volant qui serait devant toi sur la route. Tu n’hésites pas à qualifier de « pute » la prof qui t’interroge, « salope » à la journaliste qui ne te pose pas les questions que tu avais envie d’entendre, « pouffiasse » à la député qui fait une déclaration que tu trouves inopportune, « suceuse » à la collègue qui travaille plus et mieux que toi. Ensuite, tu trouves aussi l’occasion de placer un méprisant « chérie » pour la camarade qui propose une motion différente de la tienne, et tu sais affectueusement nommer « petites putes » les filles du centre social qui demandent des horaires de salles pour leurs initiatives (parce que tu es quand même un mec avec du sentiment).

He bien camarade sexiste, je tiens à te le dire, à mes yeux tu es un fasciste. Oui, vraiment un fasciste. Parce que si tu refuses de comprendre (et tu le refuses volontairement, parce que tu sembles capables de comprendre tout le reste en dehors de ça) ce que veut dire le sexisme, c’est parce que ça t’arrange. C’est parce que tu aimes avoir un espace dans lequel exercer ton pouvoir de mâle et que tu veux le garder. Et pour ça tu t’en prends aux camarades femmes. Qui, à ce moment-là, ne sont pas des camarades, mais des connasses. Même pas des femmes ; mot qui en fait ne t’intéresse pas. Parce que derrière le sale arabe ou le flamand de merde, il y a un homme, et là tu comprends qu’en utilisant ces expressions ça insulte des hommes comme toi ; mais si tu dis salope, là non, tu ne le comprends pas. Enfin, tant qu’elles ne cassent pas les couilles, qu’elles soient salopes c’est même pas dérangeant non ?

Cher camarade sexiste, je te méprise. Tu peux avoir un tatouage du Che sur le front et le marteau et la faucille brodés sur le slip. Tu peux même avoir Le Capital dans ta bibliothèque en édition originale et savoir chanter l’internationale en russe, tu restes quand même un fasciste. Parce que le pouvoir d’être un mâle te plait et que tu le serres dans tes mains. Alors peu importe les couleurs que tu portes, tu me dégoûtes, tout simplement.


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